La disparition du Professeur Candolfi, décédé le samedi 18 mai 2019 à l’âge de 61 ans, alors qu’il menait une carrière exceptionnelle, affecte l’ensemble de la SFP dont Ermanno était membre depuis 1984 et membre du CA de 2005 à 2012. Doté d’un esprit éclectique et foisonnant, capable de s’intéresser à de multiples sujets, il a mené de front de nombreux projets hospitaliers et universitaires.
Ses recherches l’ont amené à une reconnaissance internationale dans le domaine de la parasitologie et en particulier de la toxoplasmose, faisant de Strasbourg un centre national de référence et d’expertise en la matière. Au titre de Professeur des Universités et de Praticien Hospitalier, il assumait des missions de médecin, de chercheur et d’enseignant.
Né le 21 juin 1957 à Santa Maria Nuova en Italie, il rejoint, avec sa sœur et sa mère, son père qui avait immigré à Mulhouse.
1/ Ermanno était un excellent chercheur : son parcours scientifique a débuté à l’âge de 24 ans comme stagiaire à l’Institut de Parasitologie et de Pathologie Tropicale. Il est nommé MCU-PH en 1988 puis PU-PH 10 ans plus tard. En 2000, âgé de 43 ans, il prend la direction de l’Institut.
Il y développe une équipe de recherche dont la principale thématique est centrée sur la toxoplasmose et Toxoplasma gondii. Il mêle dans ses travaux des aspects de recherche fondamentale en traitant la relation hôte-parasite sur le plan de la physiopathologie et de la réponse immunologique. Son stage post-doctoral effectué à Stanford de 1992 à 1994 dans l’équipe de Jack Remington avec José Montoya lui aura probablement apporté autant sur le plan scientifique que sur le plan managérial pour la direction future de ses équipes.
Il a également développé une recherche translationnelle et introduit de nouvelles techniques diagnostiques. Il a pris la responsabilité du Pôle Sérologie du CNR de la Toxoplasmose en 2006 lors de sa création et a ainsi initié de nombreux travaux d’expertise collaboratifs publiant des articles co-signés par tous les membres du CNR, contribuant à la force de ce réseau.
Il était membre de la Société Française de Pathologie Exotique, intriquée avec la SFP dans diverses pathologies auxquelles Ermanno s’intéressait.
Son rayonnement scientifique était internationalement reconnu, en témoigne les très nombreuses conférences invitées internationales et les publications (170 publications internationales référencées jusqu’en 2018 et 33 nationales). Il a dirigé 18 thèses d’exercice et encadré 18 thèses d’université dans le domaine de la Parasitologie avec une rigueur scientifique sans concession. Il bénéficiait de la PEDR depuis 2010, témoignant ainsi de sa très haute notoriété en recherche. Il a été promu professeur à la classe exceptionnelle au dernier échelon en 2017. Ses étudiants et collègues qu’il a encadrés ou épaulés, appréciaient en lui ses exceptionnelles capacités de travail et son très grand esprit de compagnonnage.
2/ Ermanno était passionné d’enseignement, pédagogue enthousiaste et admiré, qui n’hésitait pas à déborder de ses heures d’enseignement tant il imageait ses cours par des histoires ou anecdotes, marquant ainsi son très large auditoire (étudiants, techniciens, chercheurs de son équipe).
Il est entré au CNU en 2004 et y est resté jusqu’en 2017 (année de la découverte de sa maladie). Il aura ainsi accompagné de nombreux jeunes collègues dans leur parcours hospitalo-universitaire et effectué plusieurs missions d’études sur des réorganisations hospitalières et hospitalo-universitaires, toujours dans un souci d’équité et de bienveillance.
3/ Ermanno était un chef d’équipe bienveillant, à l’écoute et soucieux de ses collaborateurs et étudiants avec qui il travaillait. C’était un homme d’une extrême disponibilité pour les autres, « paternant » à l’image d’un père aimant pour ses enfants.
Au plan local, il s’est entouré d’une équipe hospitalière et universitaire de grande qualité, il a conduit son équipe en emportant toujours l’enthousiasme et l’adhésion nécessaires aux évolutions qu’il souhaitait conduire, il était un homme persuadant et s’attachait toujours à expliquer pourquoi il souhaitait les développements qu’il conduisait.
Ermanno a préparé son départ au sein de son équipe en nommant dès janvier 2018, le Docteur Denis Filisetti comme responsable de l’équipe hospitalière en collaboration avec la Docteure Odile Conraux-Villard pour le CNR de la toxoplasmose, et chargeant le Docteurr Alexander Pfaff de conduire les projets de recherche. La Dr Valérie Letscher- Bru, responsable du secteur de mycologie, travaillait également en étroite collaboration avec le Porfesseur Candolfi, soucieux de préserver la complémentarité de nos deux disciplines.
4/ Ermanno était un visionnaire :
- Au plan Hospitalier : il a initié et développé le Plateau Technique de Microbiologie des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg (HUS) dès 2011 avec les Professeurs Yves Piémont (Bactériologie) et Jean-Pierre Gut (Virologie), apportant une vision transdisciplinaire et promouvant une mutualisation technique tout en conservant et soutenant la spécificité de notre discipline. Il a entrepris la réflexion sur la restructuration du pôle de biologie des HUS projetée à horizon 2020, en développant des plateaux techniques à l’interface de la recherche et du diagnostic en génomique et métabolomique.
Il s’est fortement impliqué, en plus de ses implications nationales dans les instances locales et régionales : chef de service en 2000, chef du Pôle de Biologie de 2013 jusqu’en 2017, membre du Directoire des HUS depuis 2013 et Vice-Président Recherche des HUS depuis 2016.
- Au plan de la Recherche, Il a également apporté des éclairages nouveaux sur la physiopathologie de la toxoplasmose en lien avec la biodiversité des souches et ce dans divers aspects : transmission congénitale, toxoplasmose oculaire, réponse immunitaire à l’infection et en s’intéressant de façon plus récente aux implications neurologiques de cette infection. Il a développé de très nombreuses collaborations scientifiques au plan national et international, nouant des relations amicales avec ses partenaires qui devenaient souvent ses amis. Nous sommes très nombreux à en être les témoins.
Enfin, Ermanno fut un homme courageux dans ses choix professionnels et dans sa vie personnelle. Atteint d’une maladie qu’il savait incurable, il a continué d’exercer son métier avec passion en se rendant chaque jour dans son service durant deux années, combinant les soins et son agenda professionnel. Ce courage force l’admiration de tous ceux qui l’ont côtoyé.
Ermanno aimait la vie, un Homme de grande qualité s’en est allé à la veille du congrès conjoint de la SFP et de la SFMM. Il était partisan de la promotion de ces doubles congrès qu’il avait organisés à deux reprises à Strasbourg (en 2007 innovant un congrès mixte avec les Sociétés de Parasitologie Allemandes et Suisses et en 2011), faisant ainsi rayonner sa ville et son équipe.
D’émouvants hommages lui furent rendu à Tours lors de notre dernier Congrès qui lui a été dédié par les organisateurs.
Texte préparé avec l’aide des membres du laboratoire de parasitologie et mycologie médicale des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg et de l’Institut de Parasitologie et de Pathologie Tropicale de l’Université de Strasbourg.